À mi-chemin entre Qazvin et Hamadan, une petite route part de la localité d'Ab-e Garm vers l'ouest, à travers la vallée de Kharraqan. Cette large vallée ouverte est peu cultivée, on s'y sent très vite loin de tout. Une trentaine de kilomètres plus loin se trouve l'unique village de l'endroit, Hisar-e Armani; on y voit tout d'abord que des ruines de maison en pisé, puis le nouveau village un peu plus loin. Enfin, deux kilomètres après la sortie du village, sur la gauche, s'élèvent les deux tombeaux-tours, au milieu d'un cimetière abandonné.

Ces tombeaux ont été construits en 1063 pour la tour est, la plus petite, et 1093 pour la tour ouest; on ignore l'identité des personnes enterrées ici, mais on suppose qu'il s'agit de gouverneurs ou d' aristocrates seljoukides de la région. On ne connaît que le nom des architectes, respectivement Muhammad ibn Makki al-Zanjani et Abu'l-Ma'ali ibn Makki al-Zanjani (probablement le fils ou le frère du précédent). Tombées dans l'oubli, elles ont été redécouvertes par les occidentaux en 1965. Et quelle découverte: il s'agit en fait des deux plus beaux exemples de l'art seljoukide de la décoration de brique! Ce sont également les premiers édifices à double dôme du pays.

Chaque panneau de ces tours octogonales représente une arche encadrée de colonnes encastrées; sur la tour ouest, hormis le côté de la porte, les arches sont divisées en deux registres, séparées par trois petites arches trilobées. Toutes les surfaces, y compris les colonnes, portent un motif unique. Un bandeau d'inscription kufique surmonte les panneaux, puis un dernier panneau précède le double dôme. Le dôme extérieur a disparu sur les deux tours, il n'en reste que la base. L'intérieur de la tour est est décoré de plâtre peint; celui de la tour ouest est plus dépouillé, seulement un mirhab de plâtre.

Lorsqu'elles ont été repérées en 1965, un grande partie du revêtement de brique et même du bas des murs était tombé, suite à des inflitrations d'eau dues à la montée de la nappe phréatique. Des travaux de restauration ont été menés, mais le 22 juin 2002, un séisme de magnitude 6,6 a ébranlé la région d'Ab-e Garm, causant 260 morts, détruisant le village de Hisar-e Armani et endommageant gravement les tombeaux de Kharraqan. Les murs sont fissurés, les bases des dômes se sont écroulées et une partie du revêtement de brique est tombé. Des étais ont été mis en place pour prévenir un écroulement complet. Des travaux de restauration ont à nouveau été lancés, mais ils semblaient suspendus lorsque j'y suis passé en 2004. On ne peut plus visiter l'intérieur, qui sert à stocker les briques tombées, et on ne peut même pas approcher les tours, qui sont désormais encerclées par un grillage.